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Le Chant joyeux, ou La Joie de chanter

Dans le cadre de nos prestations avec le groupe vocal les Grandes Gueules, on est parfois amené à animer des stages de chant soit pour des adultes amateurs, soit dans des écoles, collèges, maisons de retraites, ou foyers pour personnes handicapées.

Au début j’appréhendais ces séances, car on découvre les conditions de travail, et surtout les participants, en direct live, avec comme seule préparation notre expérience musicale et humaine. Mais c’est justement ça qui me ramène à l’essentiel de ce métier.

Après des années, voir des décennies de cours, d’enregistrements, de concerts, de démarchage, de campagnes pour cueillir des fonds et faire la promo, ces rencontres me rappellent que le chant est avant tout la JOIE de transformer la respiration en un son que l’on puisse ensuite partager, moduler, unir avec les autres, et utiliser comme baromètre pour son propre état d’esprit. Ma voix me dit quand je suis fatiguée ou énervée. Et le fait d’offrir cette expérience à des personnes aussi différentes est passionnant et émouvant, peut-être même plus que de chanter pour les grandes occasions !

En partageant notre travail, on trouve de tout : chez les enfants, de l’enthousiasme qui nous épuise, de la gêne qui fait rigoler ; chez les ados, un air blasé accompagné par des “c’est pas mal” et un super engagement au concert quand même ; chez les personnes en difficulté, de l’émotion pure, des câlins, des souvenirs d’airs chantonnés au siècle dernier, des étincelles dans les yeux de plus en plus souvent vides ou fermés.

C’est ça, chanter, vivre, occuper cette planète !

Par |2017-03-28T15:25:13+01:00mars 28th, 2017|Jazz vocal|0 commentaire

En Résidence

Ca y est : le mercredi 21 décembre 2016, les Grandes Gueules a capella feront la création du spectacle Salvador ! (Henri, non pas Dalí) au Théâtre d’O à Montpellier. Trois concerts, le 21, 22 et 23 marqueront la fin d’une série de résidences artistiques effectuées depuis mai 2016, dans différentes salles françaises.

En fait, c’est quoi une résidence ?

Bonne question…

Faire une résidence est vivre dans une bulle bien éclairée, parfois bruyante, pendant environ 3 à 15 jours. On est logé, blanchi, et nourri – de spécialités locales ainsi que de musique, paroles, lumières, déplacements et pas de danse. En fait on “squatte” le théâtre pour pouvoir peaufiner tous les aspects d’un nouveau spectacle, dans des conditions réelles. C’est une belle sensation de pouvoir consacrer du temps rien qu’à la recherche d’idées, au chant, à la polyphonie, et à la mise en espace sur le plateau. Ca change des gigs où l’on arrive l’après-midi, on fait la balance avec plus ou moins de succès, on joue le soir et hop ! On repart.

Bien sûr, et surtout avec ce groupe qui fait un travail très pointu sur le son, la technologie et l’éclairage, il y a des blocages et des périodes d’attente, mais mêmes ceux-ci peuvent se transformer en moments créatifs. Je pense à la traversée des champs en voiture pour trouver le bon parking du domaine, la séance de Wii / Let’s Dance 2017 pour cueillir des idées de chorégraphie, et les innombrables photos et mini-films pour roder des grimaces, des bruits, des phrases fétiche…

A mon avis la clé d’une résidence réussie est la souplesse d’esprit : pas toujours évident de trouver l’équilibre entre ses propres idées / besoins / points de vue, et la mise en veille de ceux-ci pour avancer plus vite et laisser la place aux autres. Pour certains il faut des décennies pour arriver à ce lâcher prise, et évidemment il y en a qui n’y arrivent jamais…

Mais le 21 décembre le travail et le questionnement seront oubliés, et l’on tentera de créer des moments de magie en tirant notre chapeau à cette grande figure de la chanson française, Henri Salvador. Quelle chance d’être en compagnie de David Richard, Marie Foessel, Bruno Lecossois, Sophie Maio (son et lumière) et Dominique Ratonnat (mise en scène). Croisons les doigts pour cette nouvelle aventure !

VisuelNoStop

Par |2016-12-22T12:12:39+01:00décembre 18th, 2016|Jazz vocal|0 commentaire

Petit déj chinois ?

Récemment j’ai été invitée à animer une semaine de master-class à Chengdu en Chine. N’ayant jamais travaillé avec les chinois, et n’étant pas responsable de l’organisation du voyage, je ne savais pas à quoi m’attendre. L’expérience fut tout à fait surprenante !

Par exemple, par la magie de notre interprète on apprend le premier jour qu’il est assez courant de dire, à la première rencontre, afin de savoir si la personne est bien arrivée et installée, etc. : « Bienvenue ! Vous avez eu la diarrhée ? » C’est véridique ! Imaginez ma tête en entendant ça de la bouche du directeur de l’université de Chengdu ! Puis il y a l’histoire du petit déjeuner…

C’est sûrement mes racines anglophones qui font que j’adore le petit déj sous toutes ces formes, et que je souffre si le destin m’empêche d’en prendre. Qui aurait cru que la Chine présenterait un défi très original de ce point de vue ? Le premier jour, à l’hôtel très agréable dans un quarter chic de Chengdu, je cherche la salle / le restaurant / le café qui existe dans quasiment tous les hôtels du monde, avec le parfum du café qui vous montre le chemin si vous ne le trouvez pas tout de suite. N’est-ce pas ? Dans cet hôtel toutes les indications sont en chinois, les deux personnes à l’accueil ne parlent que le chinois, il n’y a pas de restaurant au rez-de-chaussée de ce gratte-ciel haut de 50 étages, et le chauffeur arrive avant que je ne trouve mon bonheur. Toujours optimiste, je serre les dents en espérant prendre quelque chose sur le chemin.

Arrivée en avance à l’université, je fais comprendre à notre guide du jour que j’ai faim. Elle réagit avec un sourire qui cache mal son angoisse à l’idée d’organiser quelque chose à l’improviste, et surtout d’approfondir notre communication. Après 10 minutes de marche sur les chemins larges et verdoyants du campus, on arrive à un petit stand qui vend du thé, du café (hallelujah !) et du yaourt (bof…mais youpi, il n’y a que ça !). Avec gestes et sourires j’indique ce que je veux, et le vendeur l’emballe en me fixant comme le gamin qui découvre E.T.
Idéalement je m’assiérais par terre pour tout consommer en un temps record, mais la guide fait « Come ! » pour que je la suive – où ? Mystère…

Après une demi-heure de marche, yaourt chauffé à la main, j’aperçois une rue avec plein de petits restaurants à l’extrémité du campus. La guide en choisit un, nous conduit à une table, et se met à commander. Dix minutes plus tard, c’est Byzance : du riz, des légumes, du fromage frit, du tofu, de la soupe, bref, une dizaine de plats pour accompagner mon pauvre yaourt ! Pendant que je mange pour quatre, notre interprète « officiel » surgit de nulle part et nous explique que dans environ une heure et demie, après le premier master-class, on ira…manger !

Le deuxième jour je renouvelle mes efforts pour trouver le restaurant de l’hôtel. L’interprète ayant dit qu’il se trouvait au 11ème étage, je m’y dirige bien en avance (après avoir pris le mauvais ascenseur, qui ne s’arrête pas aux étages impairs), pour enfin profiter pleinement du petit déj chinois. Les portes de l’ascenseur s’ouvrent…dans un nuage de poussière et des ronronnements de perceuse ! Tout l’étage est en travaux, et ma seule consolation est de bien faire rire les ouvriers qui sont stupéfaits de me voir débarquer parmi les seaux de peinture.

Le troisième jour je commence à réfléchir à d’autres alternatives, mais mon partenaire de voyage (fan du petit déj lui aussi), s’énerve et prend les choses en main. Fixant la jeune fille de l’accueil d’un regard de taureau, il aboie le mot magique, que personne n’avait compris le premier jour : « BREAKFAST ! » Les yeux de la fille démontrent une vraie peur mélangée d’une lumière de compréhension ; avant que mon partenaire puisse l’approcher davantage, elle saisit un cahier et nous porte enfin fortune en écrivant le numéro 13.

La victoire, le paradis au 13ème étage ! Des œufs, du riz, du café, des légumes, des petits pains à la texture guimauve grise, des clients qui font du bruit en mangeant…tout est délicieux, inoubliable !

Mais en fait…avez-vous eu la diarhée ?

PandaLove

Par |2016-12-22T12:12:39+01:00août 13th, 2016|Jazz vocal, Voyages|0 commentaire

Les paroles en anglais – en France !

Depuis toujours, je suis passionnée par les sons, les langues et langages, la musique bien sûr ; alors quoi de plus naturel que d’écrire des paroles en anglais, en France ?

Quand on parle plusieurs langues (anglais-français-allemand-italien dans mon cas), parfois on a droit à des moments de confusion totale qui aboutissent à des tournures de phrase étranges ou des trous de mémoire. Selon le jour, c’est frustrant ou amusant. Mais on a aussi la capacité de faire et comprendre des jeux de mots entre deux langues. Un exemple : « Why didn’t the Frenchman take another egg? Because one was un œuf. » C’est tout con, mais ça me fait sourire depuis le lycée.

En même temps, un certain perfectionnisme et respect pour la parole me poussent à entretenir chaque langue bien séparément, pour éviter la « contamination » dans la mesure du possible. Quand j’écris des paroles pour mes chansons, les mots sont étudiés, pesés, et prononcés avant de s’intégrer dans la phrase. Je tiens à ce qu’ils soient fluides dans l’exécution, que l’expression soit claire (soit des images, soit des messages), et surtout que les accents collent aux temps forts de la mélodie, pour rester au plus proche de l’expression parlée. Souvent, mes mélodies naissent avec mes paroles, mais dans certains cas la mélodie vient d’abord – le mystère de la création…

La surprise inattendue de cette activité d’écriture de paroles en anglais en France s’est révélée, il y a quelques années, quand le chanteur français Julien Baudry m’a sollicitée pour la première fois en tant qu’auteur. Là, ce n’était pas le même travail ! Il avait des mélodies, des arrangements, des titres, des idées de ce qu’il voulait exprimer, alors j’ai dû plonger dans son univers, imaginer les mots qui seraient faciles à prononcer et qui correspondraient à son image. C’était très intéressant à faire, et son enthousiasme était encourageant.

Cette première expérience a ouvert la porte à d’autres : une commission avec pour seule consigne « drôle » ; un vrai travail de « coaching » et d’« oreille extérieure » pour des artistes qui se lancent dans l’écriture ; un développement « phonétique » des paroles pour un artiste qui chante ses mélodies d’abord « en yaourt » (un enchaînement de syllabes incompréhensibles) pour me donner une idée des sons qui viennent naturellement. Ensuite je construis le sens et les paroles en restant proche de ces sonorités. Travail minutieux mais passionnant et, je l’espère, très confortable pour l’interprète.

Hélas, en découvrant une chanson, on ne fait pas toujours attention aux paroles ; possible donc que ces efforts ne touchent qu’une petite communauté de passionnés. Pas grave, trouvons-nous entre nous ! J’adore ça, tout simplement : la précision, le mariage des syllabes et des airs, la juxtaposition de cultures, de langues et langages. J’aime écrire les paroles en anglais – en France.

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Tout commence dans la tête !

Par |2016-12-22T12:12:39+01:00février 2nd, 2015|paroles|0 commentaire

Le jazz vocal et la polyphonie, vol. 2

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The Williams Ephlats, ca. 1988

Le jazz vocal et la polyphonie, comme on le sait depuis mon dernier article, sont au cœur de ma passion pour la musique.

L’année dernière il y a eu une réunion de mon groupe a cappella de la fac, les Williams Ephlats. A mon plus grand regret, je n’ai pas pu y aller. Mais ça ne m’a pas empêché d’être là, virtuellement, avec ces 12 chanteuses et chanteurs drôles et talentueux, et de réfléchir de nouveau à cette entité particulière qui est le groupe vocal.

Parfois (vous l’avez peut-être remarqué :)), il y a une rivalité entre les chanteuses / chanteurs solistes, difficilement explicable mais peut-être liée au fait que l’instrument est le corps, c’est-à-dire soi-même. Tout échec peut être ressenti comme un rejet de l’individu dans sa totalité. Le fait que l’aspect visuel compte au moins dix fois plus pour les chanteuses(eurs) que pour les instrumentistes n’arrange pas les choses, puisque l’image devient vite une obsession. Mais peut-être que d’autres auront d’autres théories ?

A vous de juger cette histoire vraie : une chanteuse lyrique colorature (qui chante plutôt dans les aigus) avoue à une mezzo (qui chante plus bas) : « Ah, heureusement que tu es mezzo. Si tu étais colorature, on ne pourrait pas être amies ! » Bon, le lyrique, c’est autre chose encore…

Mais quand le jazz vocal et la polyphonie se rencontrent, l’ambiance est différente. Dans un groupe vocal, les voix se réunissent pour se renforcer, se mettre en valeur, même si au niveau social il y a une observation et prise de rôle qui se fait. Avant de donner quelques exemples, laissez-moi préciser qu’ils peuvent se décliner au masculin aussi bien qu’au féminin : le clown, la folle qui perd toujours quelque chose, le râleur, la retardataire incurable, la perfectionniste, le séducteur… Au cours des années, j’ai intégré différents groupes, et c’était aussi passionnant de trouver un rôle que de me confronter aux défis musicaux !

Sur mes deux premiers albums en tant que leader, je tenais à inclure des chansons « polyphoniques » a cappella : « Tout Doucement » sur l’album Twinkle (Pitch Puppy Productions, 2007) ; et « Blue Boots » sur am I am (Juste une trace, 2011). Ce fut un énorme plaisir d’arranger et d’enregistrer toutes les voix (et du coup, pas de rivalité, ni de rôle…). 😉 Sur mon troisième album, actuellement en préparation, il y en aura sûrement un autre. Décidément, en ce qui me concerne, le jazz vocal et la polyphonie sont inséparables !

Par |2016-12-22T12:12:39+01:00juin 17th, 2014|Jazz vocal|0 commentaire

Le jazz vocal et la polyphonie

Le jazz vocal et la polyphonie sont parmi les choses que je préfère au monde, alors imaginez ce que ça donne quand ils se rencontrent ! La phrase « jazz vocal » évoque souvent l’image d’une seule chanteuse accompagnée par un certain nombre d’instrumentistes. J’ai grandi avec cette idée jusqu’au jour où j’ai découvert les Manhattan Transfer en écoutant un 33 tours qui appartenait à ma sœur. Bouleversement total ! Les harmonies proches, le rythme et la diction parfaitement synchronisés, et surtout le côté « convivial » émanant des deux voix féminines et deux voix masculines. C’était le début de mon histoire d’amour avec le jazz vocal et la polyphonie.

Après les Manhattan Transfer, j’ai découvert Lambert, Hendricks and Ross, un groupe formidable des années 50-60, peut-être un peu moins juste, moins en place – ce qui faisait tout leur charme ! Ils ne se prenaient pas trop au sérieux et improvisaient plus. Un autre groupe dans le genre était les Meltones, dirigé par mon chanteur fétiche Mel Tormé. J’adore leurs arrangements intelligents,  ludiques et légèrement kitsch ! Très important d’évoquer également Take Six, qui me fait pleurer à chaque fois que j’entends certaines chansons, par la puissance et la virtuosité de chaque voix, ainsi que les arrangements qui poussent les limites des tessitures et créent des harmonies à tomber par terre. Puis en arrivant en France j’ai découvert les Double Six, dirigés par Mimi Perrin – tout aussi étonnant dans leur manière de faire swinguer la langue française comme aucun projet vocal auparavant.

Ma propre expérience avec le jazz vocal et la polyphonie a toujours été riche et passionnante. En commençant avec mon groupe a cappella à la fac, les Williams College Ephlats, j’ai casé quelques arrangements de jazz (« My Funny Valentine »…) dans un répertoire plutôt dédié aux gros tubes des années 80. Quel bonheur, mêlé à l’insouciance de la jeunesse ! Lors de mon séjour de cinq ans en Allemagne, le groupe cabaret Snooties & the Cats faisait un mélange improbable de standards, chansons et rock avec le bonus des changements de costume (dont un chapeau clignotant en forme de Tour Eiffel), décors modulables, diapos… chaque concert fut un évènement surprenant – parfois pour nous aussi. J Et c’est en France que la musique s’est agrémentée d’effets électroniques, avec les Grandes Gueules – et l’ingénieur du son est devenu membre du groupe à part entière.

La musique à part, les groupes vocaux cultivent des ambiances que l’on ne trouve nulle part ailleurs – sujet que je développerai dans un autre article sur le jazz vocal et la polyphonie, à paraître prochainement…

Snooties+theCats

Snooties & the Cats, au sommet de leur activité !

Par |2016-12-22T12:12:40+01:00avril 9th, 2014|Jazz vocal|0 commentaire

Le métro à Paris – source d’inspiration ?

Quand on arrive à Paris, surtout après avoir visité d’autres grandes villes, on est tout de suite impressionné par l’efficacité de son métro. 14 lignes, des stations très rapprochées, une signalisation hors pair – on serait fou de ne pas le prendre plusieurs fois par jour avec joie et enthousiasme. Ou bien… ? (<- clin d’œil spontané à mes chers amis les suisses :)).

Mes premières années à Paris, je faisais partie des voyageurs heureux et curieux de découvrir les visages et les tenues des parisiens typiques et variés. Sur le plan des lignes, les couleurs s’entrelaçaient comme un arc en ciel menant au trésor. Une touche décorative particulière, les vers gagnants d’un concours de poésie, me fournissait de la matière pour améliorer mon français et prendre l’air d’une personne cultivée. Quand j’ai commencé à me consacrer pleinement à la musique, le métro à Paris ne cessait d’être une source d’inspiration, voire de bien-être.

Aujourd’hui…j’avoue que plus le temps passe, plus les têtes des voyageurs me semblent légèrement grises, et plus la place semble se rétrécir. Heureusement qu’il y a des musiciens ! Obligés de passer une audition et de porter un badge… Des fois il y a, par exemple, des accordéonistes qui refont les grands tubes de la chanson française avec, disons, la moitié des accords originaux. Ca économise de l’énergie musculaire, sûrement !

Mais s’il n’est pas toujours gai, le métro à Paris reste toujours une source d’inspiration. L’autre jour en fut un exemple inoubliable. En route pour un enregistrement dans le nord, je prends la ligne 7 (rose= jolie !). A l’arrêt « Pyramides » un mec monte dans le train, la trentaine, léger embonpoint, peau mate, cheveux noirs, plutôt sympa à regarder. Puis il ouvre la bouche. « Bonjour Mesdames et Messieurs, excusez-moi de vous déranger… » Direct, je sens la tension exaspérée s’installer parmi mes co-voyageurs. Encore un qui veut des sous ! Mais la suite nous éblouit : « Je ne suis pas là aujourd’hui pour demander des sous, au contraire, je gagne bien ma vie. Si je passe parmi vous, c’est parce que je souhaite me marier au plus vite. Je cherche une femme, qui a ses papiers en ordre, bien sûr. Mesdames, vous pouvez me croire, je vous offre ma carte bleue, et je suis performant, je ne m’arrête jamais. »

Inspirée par la pure folie de ce discours, je cherche à engager les regards des inconnus autour, histoire de partager un sourire (chose rare comme les léopards dans le métro). Impossible, incroyable, improbable ! Les gens font comme si de rien n’était, même quand le jeune homme poursuit avec « Maintenant, Mesdames, je vais passer parmi vous avec mon portable. Laissez-moi vos numéros, je ferai une sélection. Vous pouvez également me suivre, je descends ici. Je n’ai pas beaucoup de temps. » Rien à faire – comme des coffres-forts suisses, les visages parisiens restent unanimement durs et verrouillés.

Le moment qui suit est magique. Le train s’arrête à Louis Blanc. Le marié en herbe descend sur le quai. La sonnerie sonne. Comme le clap d’un tournage, le claquement des portes déclenche une rigolade comme je n’ai jamais entendu dans la Ville Lumière. Tout le monde se regarde, soudainement soudé et soulagé. Quelques hommes laissent échapper un « Bravo ! » admiratif. Une petite vieille s’évente avec son foulard. Une jeune fille se retourne, les larmes aux yeux, pour jeter un dernier regard sur celui qui aurait pu être l’homme de sa vie.

Un jeune homme courageux et prometteur dans le métro à Paris – source d’inspiration par excellence. Ou bien ?

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Par |2016-12-22T12:12:40+01:00février 12th, 2014|La vie de tous les jours|0 commentaire

Le jazz vocal et les animaux

Parmi mes rêves un peu étranges est celui de monter un projet qui lie le jazz vocal et les animaux. Mais sans être ridicule. Pas facile ! Quand j’étais petite, je voulais être vétérinaire, comme beaucoup d’enfants – jusqu’au moment où j’ai compris qu’il aurait fallu voir les bêtes souffrir, leur faire des piqûres, voire les accompagner en fin de vie, et tout ça au bout d’une douzaine d’années d’études ! Par le passé j’étais bien trop distraite pour envisager un engagement pareil – et peut-être encore aujourd’hui… De toute façon, le destin a fait que je me suis trouvé en Europe à faire la musique, mais ma double passion pour le jazz vocal et les animaux n’a pas encore trouvé un moyen d’exister.

VDA18Apparemment je ne suis pas seule dans cette dualité : Brigitte Bardot est peut-être l’exemple le plus flagrant d’une artiste transformée en militante dédiée à la cause des quatre-pattes. Sarah Bernhardt voyageait avec son entourage d’animaux exotiques. Et j’ai appris récemment qu’une copine chanteuse s’est spécialisée, en plus des standards de jazz, en comportement félin. Il lui arrive donc, dans l’espace d’une semaine, d’enseigner le chant, de faire un concert, et d’étudier la tendance de Chouchoutte à se soulager dans les géraniums de Mamie. Si ce n’est pas la fusion, c’est la juxtaposition étroite de deux passions. C’est déjà ça.

Quand j’y réfléchis bien, c’est sûrement dû à la vaste différence entre le jazz vocal et les animaux qu’ils ne se mélangent pas facilement. Le jazz vocal cherche la profondeur, le développement, l’élégance. Le chien cherche à s’allonger là où il gêne plus le passage.

Il y a quelques années, les jazzmen parisiens ont bien rigolé d’un copain saxophoniste qui a fait un disque pour et avec les animaux. Rien à faire, les deux choses sont trop éloignées, on finit forcément par perdre la crédibilité. Au fait, plus de nouvelles de ce musicien…

Dans ma chambre à coucher il y a une affiche encadrée d’une photo en noir et blanc de la crooneuse légendaire Billie Holiday, souriante, soulevant en l’air ce qui pourrait être un chihuahua, nommé Peppi. Tous les jours je me réveille donc en regardant Billie et Peppi, tout en réveillant l’espoir de réunir le jazz vocal et les animaux un jour.

Par |2016-12-22T12:12:40+01:00janvier 7th, 2014|Jazz vocal|0 commentaire

Les voyages et la musique

Il y a une liaison indéniable entre les voyages et la musique. On peut parler d’une chanson, ou d’un album comme un voyage, et en tant que musicien professionnel on voyage souvent pour jouer – très important avant de choisir ce métier ! Dernièrement je parlais avec une copine très musicale, qui m’a dit qu’elle tombait toujours malade en voiture. Alors là, il faut dire que la vie de musicien serait particulièrement difficile pour elle… Des fois c’est un vrai défi de s’organiser pour ne rien oublier, d’être à l’heure pour le train / l’avion / le car / la voiture / le bateau, de s’adapter à la nourriture / aux conditions techniques / au lit, de partager un maximum avant, pendant et après le concert, et de repartir le lendemain.

Ambiance de jour à Moscou :)

Ambiance de jour à Moscou 🙂

Ce que j’aime dans les voyages et la musique : les voitures-bars iDTGV festives, les blagues entre membres du groupe, les animaux accompagnateurs qui se font entendre, le paysage qui défile et inspire, les retrouvailles.

Les voyages et la musique  – mes Top 5 :

Moscou, Russie, 1999 : On a traversé les stéréotypes (la vodka, le froid, le chauffeur nommé Boris…) pour découvrir un peuple chaleureux, amoureux de la France.
Des Moines, Iowa, USA, 2005 : Beau concert organisé par une amie de longue date, précédé d’un tour au salon de l’agriculture pour saluer le plus gros porc des Etats-Unis. Public debout (porc allongé) !
Dubrovnik, Croatie, 2006 : Ville-forte magnifique, ensoleillée, avec un joli théâtre et des calamars délicieux.
Nice, 2010 : Le festival est merveilleusement bien organisé, un super exercice pour apprendre à être efficace.
Taïwan, 2012 : Mélange parfait entre un manque total de repères et une prise en main à 150% ! Et une appréciation que je n’ai vue nulle part ailleurs…

J’ai de la chance. Si on ne compte pas les frites, les deux choses que je préfère au monde sont…les voyages et la musique.

Fin de soirée à Taïpei !

Fin de soirée à Taïpei !

Par |2016-12-22T12:12:40+01:00octobre 22nd, 2013|Voyages|0 commentaire

Une artiste expatriée en France

Aujourd’hui je peux me définir, sans y réfléchir, comme une artiste expatriée en France, une américaine à Paris, une chanteuse, vocaliste de jazz-pop, compositrice, pianiste, guitariste en herbe… Mais le voyage est long, et la destination me semble toujours loin…

Sur le Pont neuf – Photo : Chester Harlan

Sur le Pont neuf – Photo : Chester Harlan

Quand je me suis installée à Paris, il y a une vingtaine d’années, je me suis appuyée sur les leçons apprises à Williams College, une petite université privée dans le Massachusetts. Là-bas on nous enseignait les matières les plus variées avant de nous demander de nous spécialiser dans un sujet, de manière à « apprendre comment apprendre » et cultiver la curiosité et la polyvalence. Ne sachant pas ce que je voulais (ou n’osant pas le dire), je n’imaginais jamais rester aussi longtemps, et devenir une artiste expatriée en France aujourd’hui. Après avoir travaillé 5 ans à Munich et 3 ans et demi dans une maison de disque à Paris, j’ai décidé de tenter le coup de suivre mon rêve de chanter en publique, tout en poursuivant l’activité plus « raisonnable » de la traduction. Par un heureux hasard j’ai intégré en 1997 un atelier d’écriture qui m’a inspirée à écrire des nouvelles en compagnie d’autres expatriées anglophones. Le soutien inconditionnel et la bonne humeur de ce groupe fut essentiel pour me permettre de compléter mes premières œuvres, et aujourd’hui une série de nouvelles issues de nos nombreuses séances est en train de devenir un roman dans lequel il s’agit… d’une artiste expatriée en France !

C’est un immense plaisir, de temps en temps, de croiser d’autres artistes expatriés en France, qu’ils soient américains, italiens, grecs, coréens, chiliens… on se retrouve, on prend un café, on partage les histoires de notre arrivée en Europe, nos premiers pas créatifs, nos défis bureaucratiques, nos couples parfois compliqués quand il s’agit de deux artistes. Et au cœur de nos différents parcours et cultures, nous nous accrochons aux fils conducteurs des artistes expatriés en France : l’expression, le désir d’y arriver malgré tout, la curiosité, la vie.

Par |2016-12-22T12:12:40+01:00octobre 1st, 2013|La vie de tous les jours, Voyages|0 commentaire
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